Episode 6 : « La « Balle » Epoque ou la domination des étudiants caennais »
Ami lecteur, toi qui adules Albert Camus et a vibré au touché de balle des frères Laudrup, salut !
L’hiver 1900 marque l’envol du championnat de football USFSA du comité du Nord-Ouest, siégeant à Caen sous la présidence de M. Noé Barbé, et rayonnant sur les trois départements « bas-normands » ainsi que sur l’Eure. A cette date, les sociétés d’exercice physiques qui le composent sont essentiellement scolaires ou étudiantes, à l’exception notable du Club Sportif Caennais. Malgré le frémissement qui gagne l’ensemble de la région (de l’Association Sportive du collège d’Avranches à l’AS du lycée de Cherbourg, en passant par Alençon et Lisieux), six équipes seulement sont officiellement engagées dans la compétition : la Normalienne de Caen, l’ASEC, l’UALM, le CSC, ainsi que les collèges de Vire et de Coutances. Dans les faits, les rencontres opposèrent principalement les quatre équipes caennaises sur le terrain de la Prairie. Le club de la Manche, notamment, ne participa à aucune rencontre. En guise de préparation, quelques matchs amicaux furent organisés dans la région. Ainsi, les étudiants de l’ASEC furent-ils défaits 2 à 0 sur le terrain de Lisieux le 14 janvier 1900.
Les deux premiers matchs de championnat, historiques, eurent lieu le 18 février 1900. On ne peut guère dire que les attaquants firent parler la poudre ce jour-là, même si le terrain boueux est un facteur à mettre à leur décharge. Ainsi, au score nul et vierge qui scella l’opposition quelque peu confuse entre Normaliens et lycéens de Malherbe, suivit la victoire étriquée du CSC face à l’ASEC. Bien en place, autour du gardien Guérin, de l’arrière Michel, et des demis Mahouin et Henry Prestavoine, leur capitaine, les « clubmen » crurent bien tenir la première victoire officielle du championnat (1-0), en dépit d’une domination outrageuse des étudiants (plus de trente « shoots », d’après le Journal de Caen). Hélas pour eux, le but, obtenu suite à la charge illicite d’un attaquant, fit l’objet d’une réclamation de la part de l’ASEC. La commission de football du comité du NO annula le score du match après que l’arbitre eût reconnu s’être trompé en n’appliquant pas les règlements en vigueur.
Plus aguerris, les étudiants de la Normalienne et de l’ASEC dominèrent les rencontres suivantes avant de s’affronter pour la finale du championnat, le 29 avril 1900. Joué sur le terrain de Cormelles, le match s’avèra particulièrement équilibré. Malgré les efforts d’Albert Berger et d’André Détolle, jouant respectivement aux postes d’inter-droit et d’inter-gauche, les joueurs de l’ASEC s’inclinèrent sur le score de 1 but à 0. Revanche était prise pour l’année suivante ! La Normalienne, bien que titrée, ne put en revanche défendre ses chances au Guibout, arrivaient pour la finale avec une confiance certaine. Elle se déroula à la Prairie le 10 février 1901. « Après une partie disputée avec beaucoup d’ardeur, mais aussi avec une grande courtoisie », les étudiants caennais s’imposèrent 2 à 0 grâce à des buts de Détolle et de Marie. La saison suivante confirma la montée en puissance d’une équipe dont les enchaînements commencèrent à se peaufiner. L’attaque de l’ASEC, emmenée par l’excellent avant-centre anglais Milligan, fut notamment impitoyable pour le CSC, équipe qu’elle croisa à 4 reprises : 11-1 et 4-0 en amical ; 8-0 et 9-0 en championnat ! Les lycéens de Malherbe se montrèrent vaillants lors de leurs matchs, aidés en cela par la création d’un championnat interscolaire qui favorisait les affinités entre joueurs. Dans un système de poules, l’ASEC fut vainqueur du CSC, de l’UALM et de l’AS Trouville, ce qui lui octroya le droit de jouer la finale contre ses rivaux de…l’Ecole Normale, pour une belle entre les deux équipes. Jouée le 16 mars 1902, la finale s’avéra décevante aux dires de la presse, en raison principalement de l’absence de joueurs clés du côté de l’ASEC, dont le « keeper » Berneuil. L’inévitable Milligan ouvrit néanmoins le score en première période. Profitant du vent après la pause et de l’inhabituelle apathie des mauves et noirs, Lécuyer permit à son équipe d’égaliser. Le score en resta là jusqu’au coup de sifflet final. Consultés, les deux capitaines s’opposèrent à toute prolongation, ce qui nécessita de fixer une nouvelle rencontre. Mais ce match n’eut finalement jamais lieu. Prévu le 20 avril 1902, la Normalienne empocha le titre après le forfait de l’équipe adverse, incapable d’aligner ses meilleurs éléments. Déjà, les joueurs de l’UALM convoitent un titre qui n’est jamais revenu aux lycéens. Et si l’heure de Malherbe avait sonné ?
A suivre.
FDM
Discussion about this post