Malherbe nous étonnera toujours. Tel Sisyphe, se croyant parvenu à se maintenir au sommet du rocher du foot français, notre club de coeur a vu la pierre redescendre et dévaler la pente des deux dernières années. Il faut de nouveau tout recommencer ! Comme à la fin 1991, lorsque des investisseurs locaux sauvèrent le SMC, comme en 2000, avec la privatisation et l’émergence d’un modèle d’actionnariat régional, Malherbe se trouve à un moment de refondation.
Les actionnaires régionaux devront d’abord rétablir l’équilibre financier à court terme, en trouvant la dizaine de millions d’euros nécessaire. D’autres questions suivront immédiatement. Quelle politique sportive définir sur le moyen terme, alors que le club a connu quatre entraîneurs en deux ans ? Comment le SMC souhaite-t-il pérenniser son développement, après le report à une date inconnue de la construction du bâtiment dédié à l’équipe professionnelle, qui devait renforcer son attractivité ?
Si elles ne sont jamais agréables, les crises existentielles peuvent parfois avoir du bon. Une belle occasion de se réinventer et d’ouvrir un nouveau chapitre de l’encyclopédie ! D’autant que la société a beaucoup changé depuis les années 2000. Avec l’aide des réseaux sociaux et l’arrivée d’une nouvelle génération de supporters, Malherbe fédère une large communauté de passionné(e)s qui échange en ligne et fait vivre le club par-delà les frontières régionales. Comme l’a rappelé le Malherbe Normandy Kop dans un récent communiqué, les supporters constituent une composante à part entière du club, alors que le marketing du football tend à les reléguer au rang de simples consommateurs.
Comment changer la donne ? Comment mieux nous intégrer à la vie du club ? Alors qu’une nouvelle dynamique se prépare, le moment semble opportun d’offrir la possibilité aux supporters malherbistes de devenir actionnaires du SMC. L’exemple guingampais en a démontré la faisabilité puisque l’association fédérant les « Kalons » siège dans les instances décisionnelles de l’EAG. Au-delà du symbole, les actionnaires majoritaires restant aux manettes pour trancher les décisions importantes, c’est l’occasion d’expérimenter de nouvelles formes de relations dirigeants/supporters. Pourquoi ne pas organiser chaque année une grande journée conviviale réunissant toutes les composantes du Stade Malherbe ? Ce serait l’occasion d’échanger au sujet des grandes orientations et de proposer des initiatives sociales, culturelles et environnementales autour du club.
Un club dont le président pourrait débattre chaque année de son projet avec les supporters, ne resterait pas cantonné à discuter avec les partenaires mais viendrait échanger avec le public dans chacune des travées au fil des matchs. Un club dont les passionnés pourraient concevoir le maillot pour la future saison, opter pour des produits plus éthiques dans la boutique et disposeraient d’un espace dans la tribune centrale qu’ils occuperaient à tour de rôle. Un club qui cultiverait des liens vivants avec sa ville et sa région, à travers des événements sociaux et culturels qui fédéreraient autour de lui.
La démocratie corinthiane avait, dans les années 1980, inventé des relations nouvelles entre un club et ses joueurs. Les décisions qui concernaient la vie du groupe professionnel étaient prises de façon collective, avec la participation de tous les membres de l’équipe, emmenée par son capitaine, le légendaire Sócrates. En intégrant les supporters pleinement à la vie du club, on pourrait dire qu’assurément, Malherbe c’est le Brésil.